OSSERVATORIO SUI BALCANI
Relations Albanie-Kosovo : Ibrahim Rugova fait son
retour à Tirana
TRADUIT PAR MANDI GUEGUEN
Publié dans la presse : 20 septembre 2004
Mise en ligne : samedi 25 septembre 2004
Le Président Kosovar Ibrahim Rugova vient d’effectuer une visite officielle en Albanie, alors qu’il boycottait ce pays depuis le retour au pouvoir des Socialistes, il y a sept ans. À quelques semaines des élections législatives au Kosovo, cette visite a été l’occasion de demander un plus grand engagement de l’Albanie en faveur de l’indépendance.
Par Indrit Maraku
Le Président du Kosovo, Ibrahim Rugova, en Albanie pour une visite officielle de trois jours, a rencontré tous les dirigeants du pays et ouvertement demandé plus d’efforts de leur côté pour la reconnaissance de l’indépendance de la province. Le leader de la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), a nié tout motif politique à ce retour dans la capitale albanaise, à quelques semaines des élections générales qui auront lieu le 23 octobre au Kosovo.
Malgré les invitations officielles de divers dirigeants albanais, le Président kosovar n’avait pas visité l’Albanie depuis sept ans. À l’époque des négociations de Rambouillet, qui précédèrent les bombardements de l’Otan sur l’ex-Yougoslavie, le leader kosovar refusa même de quitter son avion qui faisait une escale technique à Tirana. Si les raisons de son absence restent obscures, le froid entre lui et les Socialistes de Tirana, revenus au pouvoir en 1997, est de notoriété publique.
Selon les spécialistes, la cause de ces rapports troublés est la position des Socialistes à l’égard de la question du Kosovo au moment de leur accession au pouvoir. Lorsque le Parti démocratique était au pouvoir et que Sali Berisha était Président, le Parlement de la République d’Albanie avait officiellement reconnu l’indépendance du Kosovo. Les Socialistes, eux, firent un pas en arrière, en tenant une position plus proche de celle des Occidentaux sur la question, prônant « les standards d’abord, le statut ensuite ». De plus, pendant les négociations de Rambouillet et la guerre du Kosovo, le gouvernement socialiste de Tirana a soutenu les positions du chef politique de l’époque de l’Armée de libération du Kosovo (UCK), Hashim Thaçi, aujourd’hui à la tête du Parti démocratique du Kosovo (PDK), et rival de Rugova.
Le dégel entre les deux capitales a commencé au printemps dernier, lorsque le Premier ministre albanais, Fatos Nano, s’est rendu à Pristina pour une visite officielle de deux jours, la première de ce genre pour un Premier ministre albanais dans la province kosovare. Il a eu, entre autres, un entretien de 20 minutes avec Rugova, qui avait préféré l’accueillir non pas dans son bureau présidentiel, mais dans sa résidence privée, afin de dépouiller la rencontre du caractère officiel.
Ibrahim Rugova n’oublia pas, à cette occasion, de rappeler au Premier ministre Fatos Nano que Tirana avait déjà reconnu l’indépendance de Pristina. « L’Albanie a reconnu la République du Kosovo, dit-il, elle œuvre désormais pour nous aider dans notre chemin ». Ce à quoi Fatos Nano a répliqué : « Je ne pense pas que l’indépendance soit quelque chose d’aussi formel, comme vous semblez le croire », en lui lançant ensuite une énième invitation pour une visite en Albanie, « aux beaux jours et à la fonte des neiges ».
La dernière rencontre des deux dirigeants albanais remontait à 1997, pendant un sommet international en Crète. Après un entretien avec Ibrahim Rugova, le Premier Ministre, Fatos Nano à peine investi dans cette fonction, avait serré la main de l’ex-Président yougoslave, Slobodan Milosevic, ce que Pristina n’a jamais pu accepter.
Comme Fatos Nano l’avait prédit, la neige qui empêchait le retour de Rugova à Tirana a fondu, malgré quelque retard, et comme par hasard, à quelques semaines des élections politiques du 23 octobre. Bien qu’il ait nié un lien quelconque entre les élections et sa visite, il est clair pour tout le monde que le moment choisi par Rugova pour se rendre à Tirana, n’était pas fortuit. Le motif officiel évoqué était le titre de docteur Honoris Causa, que lui a accordé l’Université de Tirana, suite à la proposition du Président de la République, Alfred Moisiu.
Pendant la rencontre avec Rugova à Tirana, Fatos Nano a reconnu dans un discours élogieux sa « contribution exceptionnelle à l’affirmation de la question du Kosovo et sa libération », en ajoutant que sa visite « pourrait aider tout le monde à mieux comprendre le nouveau Kosovo ».
Le Président du Kosovo n’a jamais perdu une occasion, à chacune de ses rencontres, pour rappeler que l’indépendance de la province était « l’unique alternative qui apporterait le calme dans la région ». « Les États-Unis et l’Union Européenne devraient reconnaître directement l’indépendance du Kosovo, -a-t-il dit aux journalistes, - ce qui est pour nous une question existentielle et nullement théorique ». Rugova a suggéré comme alternative un « forum international élargi aux pays frontaliers », qui déciderait de la question. Le Président kosovar a demandé l’aide de Tirana pour atteindre cet objectif. « Nous nous attendons désormais à ce que l’Albanie nous épaule sur le plan diplomatique, en faveur de l’indépendance », affirmait-il, en sollicitant plus d’efforts des autorités albanaises sur la question urgente de la définition du statut de la province.
Le Premier Ministre Fatos Nano et le Président de la République Alfred Moisiu ont exprimé leur soutien concernant cette question. « Il ne peut y avoir de développement en Albanie s’il y a des problèmes au Kosovo », a affirmé le Président Alfred Moisiu, pour qui la définition du statut est le seul moyen pour arrêter les extrémistes.
Le chef des démocrates, Sali Berisha, a réaffirmé son soutien total à Rugova, avec qui il entretient depuis toujours de bons rapports, en reconnaissant aussi que pour parvenir à un statut d’indépendance, « il restait à résoudre le problème des libertés et des droits des minorités, dont le respect est important pour toute la région ».
Le prétendant au trône d’Albanie, Leka Ier Zogu, a souligné le manque d’efforts de l’Albanie et souligné l’importance de son implication personnelle pour l’indépendance du Kosovo.
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© Le Courrier des Balkans pour la traduction
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20.09.2004 scriveIbrahim Rugova