Paris, le 8 juin 1999

Intervention du Premier ministre à l'Assemblée nationale sur la situation au Kosovo

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les députés,

 

Le 26 mars dernier, je vous avais exposé les raisons qui déterminaient l’engagement de la France, aux côtés de ses alliés, dans des opérations militaires aériennes contre les forces de répression serbes.

 

Je vous avais décrit la logique de la décision prise par les autorités françaises. Il nous fallait rompre le refus obstiné de M. MILOSEVIC de remplir les obligations fixées par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il nous fallait tirer les conséquences du rejet par Belgrade de l’issue politique proposée à Rambouillet - laquelle dessinait pourtant, après quinze mois de négociation, un avenir pour le Kosovo. Il nous fallait signifier au régime serbe que nous n'accepterions pas qu’il poursuive, impunément, au Kosovo - comme hier en Croatie et en Bosnie - un cycle de violence barbare. Il nous fallait enfin le contraindre à accepter, pour le Kosovo, une solution conforme au droit international et respectueuse des droits fondamentaux de la personne humaine.

 

A chacune de mes interventions devant l’Assemblée nationale et le Sénat, comme lors des rencontres que j'ai eues à l’Hôtel de Matignon avec les Présidents des groupes politiques et des Commissions concernées, ou encore des nombreuses auditions des ministres des Affaires étrangères et de la Défense auxquelles ces Commissions ont procédé, le Gouvernement a rappelé les objectifs et les modalités de l’intervention de nos forces armées. Chaque fois ont été exposées les conditions dans lesquelles ce conflit devait prendre fin. J'ai toujours insisté sur le fait que cette crise devait se terminer selon les termes fixés par la communauté internationale, et non ceux voulus par M. MILOSEVIC.

 

C'est donc avec satisfaction, mais aussi avec prudence, que nous avons accueilli, la semaine dernière, l’annonce par les autorités de Belgrade qu’elles renonçaient à l'usage de la force au Kosovo et acceptaient les principes et les conditions que le G 8 et le Secrétaire général de l’ONU, au nom de la communauté des Nations, avaient posés pour trouver une issue à la crise. Il restait à s’assurer que les engagements serbes se concrétiseraient. C’est là l’enjeu des discussions en cours au plan diplomatique comme au plan militaire. Les ministres des Affaires étrangères du G 8 viennent de se mettre d’accord, il y a une heure, sur un projet de résolution qui sera soumis au Conseil de sécurité des Nations Unies. Les discussions militaires vont reprendre. Je me réjouis avec vous de ce pas décisif accompli sur le chemin de la paix. Je suis heureux que notre diplomatie et en particulier le ministre des Affaires étrangères, Hubert VEDRINE, aient contribué activement à cette dernière avancée.

 

Mesdames et Messieurs les députés,

 

La stratégie poursuivie avec constance depuis dix semaines permet donc aujourd’hui d’envisager une sortie de crise.

 

Je voudrais vous rappeler les fondements de cette stratégie.

 

Parce que M. MILOSEVIC ne laissait pas d’autre issue, nous avons été conduits à exercer une logique de coercition.

 

Parce que le régime de Belgrade avait systématiquement opposé une fin de non-recevoir aux efforts des négociateurs de Rambouillet comme à toutes les autres formes d’intervention diplomatiques, notre stratégie devait employer des moyens militaires. Le décalage existant entre les forces de répression serbes et les populations kosovares sans défense exigeait le recours aux capacités militaires de l’OTAN.

 

Parce que Belgrade a ensuite persisté dans son refus de composer, nous avons décidé la montée en puissance des bombardements aériens pour imposer à l’adversaire notre résolution. Il a fallu poursuivre pendant plusieurs semaines la même stratégie sur un mode élargi : aux objectifs de la phase 1, touchant des centres de commandement et de défense aérienne, sont venus s’ajouter des objectifs militaires au Kosovo - sur les instruments mêmes de la répression - puis des objectifs de nature politique et économique - c’est-à-dire les instruments de la propagande et du soutien des forces.

 

Mais, parce que la perspective politique de cette stratégie était l’arrêt de la répression au Kosovo, il ne s’agissait pas de faire la guerre aux Serbes. La pression sur le pouvoir de Belgrade fut croissante, mais toujours maîtrisée. Nous avons refusé l’emballement et l’escalade.

 

Cette stratégie est validée par les faits.

 

Elle vient à bout de l’obstination de MILOSEVIC, qui doit aujourd’hui accepter ce qu’il avait toujours refusé, notamment à Rambouillet : le déploiement d’une force alliée au Kosovo, pour assurer le retour des réfugiés et pour garantir l’existence, dans la République fédérale de Yougoslavie, d’un Kosovo autonome et démocratique.

 

Frappe après frappe, notre stratégie a déstabilisé le potentiel serbe. Les dégâts infligés aux forces de répression, la désorganisation de leurs approvisionnements et de leurs soutiens logistiques, la coupure des axes de communication ont permis d’atteindre le point de rupture attendu. L’affaiblissement du moral des troupes serbes, les premiers signes de désertion et les premières manifestations de contestation ont montré au régime de M. MILOSEVIC qu’il était dans une impasse.

 

Certes, la stratégie suivie a mis du temps à produire tous ses effets. Mais vous savez bien qu’afin de réduire les risques encourus par nos soldats et de minimiser les dommages aux populations civiles, l’action militaire ne pouvait être totale, mais devait être contrôlée et progressive. Malgré toutes les précautions, plusieurs erreurs - graves - sont intervenues. Même si elles sont probablement inévitables dans un conflit de cette nature, nous devons regretter ces victimes civiles.

 

Les résultats déjà obtenus montrent combien il convenait d’être constant dans notre stratégie. Je tiens à rendre hommage au courage, à la compétence et au professionnalisme de nos forces armées et je me réjouis bien sûr qu’il n’y ait eu aucune victime dans nos rangs.

 

Nous avons aujourd’hui l’espoir d’atteindre nos objectifs. Mais nous mesurons les conséquences dramatiques qu’a eu, pour les Balkans, l’obstination de M. MILOSEVIC. Nous savons les souffrances endurées par le peuple kosovar et nous tiendrons nos engagements de voir les réfugiés rentrer dans leur pays. Nous ne voulons pas humilier le peuple serbe, entraîné par ses dirigeants dans une dérive nationaliste et meurtrière. Nous souhaitons au contraire que cette épreuve libère ce pays d’une politique barbare qui l’a mis au ban de la communauté internationale.

 

Le retour de la paix est désormais possible.

 

Jeudi dernier, les autorités fédérales yougoslaves ont accepté les bases d'un règlement du conflit dégagées par le Président finlandais, M. AHTISAARI, s’exprimant au nom de l’Union européenne, l’émissaire russe, M. Tchernomyrdine, et l’envoyé américain, M. Talbott.

 

M. MILOSEVIC s'est ainsi engagé à mettre fin à la violence au Kosovo, à retirer rapidement l'ensemble de ses forces militaires et de répression, à accepter - sous les auspices des Nations Unies - le déploiement de forces de sécurité permettant le retour, chez eux, des réfugiés et des personnes déplacées, et enfin à accepter qu'une administration provisoire s’assure que le Kosovo bénéficiera d'un statut d'autonomie substantielle au sein de la République fédérale yougoslave.

 

Ce matin, en Allemagne, les ministres des Affaires étrangères du G 8 ont mis au point un projet de résolution organisant la mise en oeuvre de ces orientations. En attendant l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU de cette résolution, l'Alliance s’attache à obtenir un début de retrait effectif et vérifiable des forces serbes, conduisant au déploiement au Kosovo de la force internationale de sécurisation. Les dernières discussions, provoquées par les autorités serbes, n’ont en rien entamé notre détermination d’aboutir au plus vite à une résolution au Conseil de sécurité.

 

Nous travaillerons jusqu’au bout pour que la paix revienne au Kosovo et que les réfugiés puissent y rentrer. Nous savons que de nombreuses difficultés entraveront leur retour, notamment du fait des terribles destructions auxquelles se sont livrées les forces serbes et des milliers de mines antipersonnel qu'elles ont posées. Il est néanmoins essentiel de s'engager dans cette voie, qui traduira concrètement la victoire du droit sur la force. Tant que l'ensemble des réfugiés ne seront pas rentrés chez eux, nous resterons à leurs côtés, où qu'ils se trouvent.

 

Sur le plan humanitaire, vous le savez, la France s'est portée au premier rang des efforts de la communauté internationale pour secourir et protéger les réfugiés dans les camps de Macédoine et d'Albanie. Elle a par ailleurs accueilli plus de 10.000 Kosovars sur son sol depuis sept semaines. Elle maintiendra son effort humanitaire, tout en accélérant avec ses partenaires européens la mobilisation de ses ressources en faveur de la reconstruction économique du Kosovo.

 

Mesdames et Messieurs les députés,

 

Dans la crise au Kosovo, la France a joué et continuera de jouer un rôle de premier plan.

 

Notre pays a pris toute sa part des actions militaires.

 

Au cours des trois derniers mois, la position de la France a été, à tout moment, en cohérence avec la ligne définie au sein de l’OTAN. La France a pleinement participé, au sein de l’Alliance, à toutes les phases des opérations militaires. Elle a été loyale et solidaire. Mais dans le schéma décisionnel, avant la prise de décision et au moment de son contrôle, la France s’est appliquée à faire valoir, avec une grande fermeté, ses points de vue. Autant notre détermination a été sans faille pour expliquer les décisions prises en commun au sein de l’Alliance, autant il m’apparaît normal que notre pays, étant donné son statut, ses responsabilités internationales et ses capacités militaires, ait toujours voulu peser aux moments décisifs. Les autorités françaises y ont constamment veillé. Je veux ici rendre hommage au ministre de la Défense, Alain RICHARD, et au chef d’Etat-major des Armées, pour la mise en oeuvre de ces orientations.

 

Notre souci d’assurer, dans ce qu’il est convenu d’appeler " la phase 2 élargie ", des mécanismes de contrôle adaptés, notre vigilance à éviter les risques de déstabilisation du Monténégro, notre exigence de voir les frappes, après les trois premières semaines, se concentrer en priorité sur les forces déployées au Kosovo, notre souci de conserver une logique de maîtrise et de retenue pour ménager les populations civiles : toutes ces orientations ont été prises en compte.

 

La France prépare désormais sa participation aux opérations de paix.

 

Le Parlement a été informé et associé par le Gouvernement à chaque étape du processus diplomatique en cours.

 

Alors que s’ébauche une nouvelle phase de l’engagement français dans les Balkans, je veux informer la Représentation nationale des conditions de la participation française aux efforts de paix.

 

Ceux-ci reposent notamment sur la mise en place d’une force de sécurisation au Kosovo, appelée K-FOR. Son état-major central aura une responsabilité de coordination importante. Sa structure est en cours de négociation entre Alliés et Russes. Cette force de près de 52.000 hommes comportera pour l’essentiel des contingents de l’OTAN, mais aussi un important détachement russe — dont le volume reste à préciser — et d’autres contributions de pays amis. La France participera à hauteur de 7.000 hommes pour cette seule force. Notre effort devrait reposer sur une brigade, dont en particulier un bataillon blindé mécanisé comprenant des chars Leclerc, deux bataillons de génie pour le déminage et la reconstruction. Des bataillons étrangers pourraient se joindre à cette brigade.

 

Dans l’état actuel des discussions avec nos alliés, nous devrions nous déployer, au sein d’un ensemble découpé en plusieurs zones multinationales, dans la partie septentrionale du Kosovo, autour de KOSOVSKA-Mitrovica. Nos forces devront sécuriser cet espace, aider le retour des personnes réfugiées et déplacées et favoriser le rétablissement d’une vie normale.

 

Il faut savoir que cette mission sera difficile. Nos forces interviendront dans un environnement dangereux, surtout au début, en raison des mines antipersonnel, des provocations possibles et de la tentation, pour certains, de recourir à la violence. Nous savons que le retour à la normale prendra du temps. Notre objectif est de garantir une solution politique stable au Kosovo. Cette force sera déployée pour une longue durée. Le Gouvernement y est prêt.

 

Mesdames et Messieurs les députés,

 

Pour l’Europe politique, pour l’Europe de la défense, la crise kosovare a constitué un tournant.

 

Il nous faudra tirer toutes les leçons de ce conflit. Si l’Europe, dans son action politique, a fait preuve d’une volonté cohérente, en particulier en défendant sa conception des négociations diplomatiques, chacun a pu prendre la mesure du chemin qu’il nous reste à parcourir pour construire l’Europe de la défense.

 

L’Europe a fait montre de sa résolution.

 

Du conseil européen de Berlin - le 24 mars dernier - à celui de Cologne - les 3 et 4 juin -, en passant par le Conseil extraordinaire de Bruxelles - le 14 avril dernier -, l'Union européenne a toujours pris ses responsabilités dans la gestion de la crise.

Elle l'a fait au nom des valeurs communes qui fondent précisément la construction de l'Union : le respect des droits de l’Homme, la démocratie, la liberté, le droit international. L'Europe ne pouvait accepter sans réagir que ces valeurs soient violées au Kosovo.

 

L’inculpation de M. MILOSEVIC, ainsi que celles de quatre autres responsables politiques et militaires serbes, pour crimes contre l’humanité, par la procureur général du Tribunal pénal international a souligné, si besoin était, combien notre réaction à cette barbarie était justifiée. Les termes de l’acte d’inculpation donnent raison aux pays qui se sont coalisés pour arrêter la force par la force, au nom du droit.

 

La décision du Tribunal nous montre également la voie pour l’avenir de cette région. Il n’y aura pas de paix sans justice. Il n’y aura pas de développement économique et de stabilité politique sans l’établissement préalable d’un Etat de droit qui protège toutes les populations et grâce auquel celles-ci pourront - quelle que soit leur origine ou leur religion - participer à l’épanouissement de la démocratie.

 

La solidarité des Quinze s’est traduite par leur engagement commun dans les opérations de l'Alliance - pour ceux qui en sont membres - et par la participation active de tous aux efforts de la diplomatie internationale. La France, par la voix du Président de la République et du Gouvernement, a joué, au sein des pays de l’Union, un rôle moteur.

 

Contrairement à ce que certains ont voulu dire, les Européens n’ont pas suivi les Etats-Unis. Ils ont participé pleinement à la prise des décisions militaires et à leur mise en œuvre. Et ils l’ont fait parce qu'ils étaient convaincus que le recours à la force était devenu inévitable face à l'intransigeance de M. MILOSEVIC.

 

S'il est vrai que les Etats-Unis ont fourni la plus grande part des moyens aériens, la participation européenne a été importante. A partir des éléments de la force d'extraction mise en place en Macédoine lors du déploiement des observateurs de l'OSCE, ce sont les Européens qui assurent l'essentiel de la présence de l'Alliance en Macédoine et en Albanie. Ce sont les Européens qui ont organisé la majeure partie de l'effort humanitaire dans ces pays, construisant des camps, protégeant la vie des centaines de milliers de réfugiés qui s'y trouvent. Ce sont les Européens qui fourniront plus de la moitié des forces de paix qui entreront bientôt au Kosovo, pour assurer la mise en œuvre des décisions du Conseil de sécurité.

 

Forte d’une diplomatie active, l’Europe a défendu sa conception de la négociation.

 

Après avoir contribué pendant des mois à la recherche d'un accord entre les parties, c'est sous l'impulsion de l'Europe - et plus particulièrement de la France et du Royaume Uni - que les négociations de Rambouillet et de l’avenue Kléber se sont tenues. Les Européens n'ont pas cessé d'agir ensuite pour que, au-delà des opérations militaires, soient dessinées des perspectives de règlement pacifique du conflit. Je veux à cet égard rendre hommage au travail de nos diplomates et, en particulier, à celui du ministre des Affaires étrangères, Hubert VEDRINE.

 

C'est l'Europe - et singulièrement la France - qui a promu le retour de la Russie dans le jeu diplomatique, parce qu'elle était convaincue que ce partenaire majeur pour la paix et la sécurité sur le continent pouvait et devait prendre une part active au processus diplomatique. Nous ne pouvons que nous réjouir du dialogue confiant qui s'est établi entre l'émissaire russe, M. Tchernomyrdine, et M. Ahtisaari, et qui a permis de donner une dynamique nouvelle à la recherche d'une issue politique pour le Kosovo.

C'est également l'Europe - et je m'en suis fait l'écho ici même il y a plusieurs semaines - qui a la première réclamé que les Nations Unies retrouvent leur place dans la recherche d'un règlement du conflit. C'est pourquoi nous avons appuyé sans hésiter la déclaration faite le 9 avril par le Secrétaire général de l'ONU pour proposer les conditions d'une solution politique.

 

Nous sommes très satisfaits que le Conseil de sécurité soit amené à jouer tout son rôle dans la séquence qui s'est ouverte il y a quelques jours. Cette évolution est en effet conforme à notre conviction que le Conseil de sécurité doit jouer un rôle primordial en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationale.

 

Dès le 14 avril, à Bruxelles, l'Europe a proposé un ensemble de mesures susceptibles d'aider les pays de la région à surmonter les conséquences de la crise, afin qu’ils puissent progresser ensemble - et dans le dialogue avec l'Union européenne - sur la voie du développement et de la démocratie. En incluant la Yougoslavie dans le projet de " Pacte de stabilité pour l'Europe du sud-est " proposé par la présidence allemande, l'Union atteste sa volonté de contribuer activement et positivement à un règlement à long terme des tensions dans les Balkans.

 

De la même façon, et à l’initiative du Président de la République, l'Union européenne a proposé de prendre en charge, dès qu'un accord de paix aura été obtenu, l'administration provisoire du Kosovo. Il y a là, me semble-t-il, le signe de la détermination européenne à agir ensemble, alors que l'Union européenne entre dans une nouvelle phase de sa construction politique.

 

Cette construction politique doit désormais faire sa place à la perspective d’une véritable Europe de la défense.

 

L’épreuve des Balkans a permis de cristalliser une conscience européenne en matière de défense.

 

Nous devons en tirer toutes les conclusions en termes de commandement, de conduite des opérations militaires, de performance comme de compatibilité des matériels et des équipements, de procédures de recueil et d’échange de renseignements, de planification et de suivi des actions militaires.

 

Il faut donc se réjouir des résultats positif du Sommet de Cologne, préparés par la déclaration franco-britannique de Saint-Malo et le communiqué franco-allemand de Toulouse. C’est un accord politique majeur qui a été obtenu à quinze. Il conforte la légitimité de l’Union européenne à traiter les questions de défense et de sécurité.

 

Trois points essentiels ont en effet été acquis.

 

• L’Europe doit se doter de moyens propres pour la préparation et le suivi des décisions, qu’il s’agisse du renseignement, de la planification stratégique ou de l’analyse des situations de crise.

• Elle doit pouvoir librement disposer de capacités militaires, que ce soit au travers du pilier européen de l’OTAN ou grâce à la mobilisation de moyens européens autonomes. Sur ce point, il faut saluer le projet de transformation du corps européen en corps européen de réaction rapide.

• Enfin, l’Europe doit procéder à une réforme institutionnelle qui passe par la création d’instances décisionnelles - le comité politique et de sécurité, le comité militaire, l’état-major européen - et l’intégration prévue, à terme, de l’UEO dans l’Union européenne.

Mesdames et Messieurs les députés,

 

A l’heure où je m’exprime, le processus de paix est en cours. La voie vers la paix est ouverte. Pour les Kosovars, pour tous les peuples des Balkans, pour l’Europe et pour la communauté internationale, nous nous devons de réussir.

 

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Débat sur la situation au Kosovo

 

Réponse aux questions des représentants de groupes parlementaires, aux présidents de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense nationale.

 

" Madame la députée,

Mesdames et messieurs les députés,

 

Je dois dire - et c'est le seul point que j'aborderai avant de répondre à vos questions - que j'ai été un peu surpris de la sensation qu'il pouvait y avoir sur certains bancs, comme une irritation à ce que ce débat soit abordé aujourd'hui. Honnêtement, comment pouviez-vous imaginer que, alors que le destin de la paix était en jeu au Kosovo, alors que se nouait de façon dramatique, et je pense maintenant positive l'issue de ce conflit, comment pouviez-vous imaginer que le Gouvernement ne propose pas au Parlement et à l'Assemblée nationale, de venir à la meilleure date possible avoir un débat avec la représentation nationale ?

 

Nous ne l'aurions pas fait, vous nous l'auriez reproché ; nous le faisons, et vous laissez entendre plus qu'à mots couverts qu'il y aurait à cela un rapport avec une échéance électorale qui existe, c'est vrai, cependant que la crise du Kosovo existe. Alors, je suis heureux qu'un certain nombre des députés de l'opposition soient là, pour que je puisse répondre à leurs questions.

 

Pouvait-on faire l'économie de ce conflit, en s'appuyant par exemple sur les opinions publiques ?

 

Honnêtement, je ne le crois pas. M. Milosevic a montré dans le passé, et encore au présent dans ce conflit, qu'il ne faisait même pas cas de sa propre opinion publique. Comment imaginer que la pression des opinions publiques internationales aurait pu produire ce que seules la coercition et la détermination de l'emploi de la force a provoqué ? Vous avez raison de noter, Monsieur le député, que tragiquement, la Serbie et M. Milosevic se retrouvent aujourd'hui au même point qu'ils étaient à l'issue des négociations de Rambouillet auxquelles ils ont refusé une issue positive, mais s'il y a eu ces destructions, ces drames, ces déportations, ces victimes civiles en Serbie même, qui ne voit que la responsabilité ne repose sur les épaules des autorités serbes ?

 

Comment nous efforçons-nous d'amorcer le processus qui doit conduire à une issue, pour veiller à ce que certains disent " nous ne nous retirerons pas tant qu'il n'y aura pas de résolution ", que d'autres disent " nous n'accepterons pas de résolution ou nous ne renoncerons pas aux frappes tant qu'il n'y aura pas de retrait ", et que d'autres encore disent - par exemple les Russes - " nous n'accepterons pas une résolution tant qu'il n'y aura pas de cessation des frappes ".

 

Et dans ce débat qui pourrait apparaître dérisoire pour savoir qui commence, qui d'une certaine façon fait la preuve de sa bonne foi, je pense que la diplomatie française a fait, au cours de ces dernières heures, depuis hier et encore aujourd'hui des propositions utiles pour aborder ces questions dans un esprit de simultanéité, de synchronisation qui permette que l'ensemble du dispositif, finalement, se mette en place.

 

Vous avez abordé aussi la question de la façon dont le Parlement est consulté ou a pu être consulté - ou plus exactement ne pas l'être - au moment de la décision des frappes, même si vous vous rappellerez que dans les questions d'actualité qui ont précédé la décision des frappes, je vous avais laissé clairement entendre que si M. Milosevic ne renonçait pas à sa politique, celle-ci serait effectivement mise en oeuvre.

 

Mais je vous réponds tout simplement à cet égard que j'applique tout simplement, en tant que Chef du Gouvernement, les institutions du pays. Je ne suis pas naturellement hostile à ce que l'on réfléchisse à leur évolution, mais c'est ainsi que la question se pose aujourd'hui.

 

La loi de programmation militaire et la question de savoir si la France disposait du type d'armes qui pouvait être utiles, selon ce qu'avait montré ce conflit :

 

En ce qui concerne la loi de programmation militaire, le Gouvernement poursuit jusqu'en 2002 la mise en oeuvre de la loi de programmation adoptée en 1996 par une précédente majorité. Nous respectons pleinement les engagements de stabilité des ressources du ministère de la Défense. Et comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer, la préparation de la prochaine loi de programmation, dont les travaux s'amorcent actuellement dans les Etats-majors pour la fin de 1999, cette loi de programmation militaire devra tirer effectivement les enseignements du conflit au Kosovo sur le comportement et les performances de nos matériels, et certainement corriger des carences au plan européen ou dans nos propres forces armées, telles que nous les avons constatées.

 

C'est vrai à cet égard que les armées françaises ne disposent pas actuellement de missiles de croisière. Parmi les forces de l'Otan, seuls les Etats-Unis et tout récemment le Royaume-Uni possèdent de telles armes. La France dotera à partir de 2001 l'armée de l'air de tels missiles : Apache en 2001, Missiles Scap en 2003, fabriqués par le groupe Aerospatiale-Matra. Mais dès aujourd'hui, et faisant l'expérience de ce conflit, nous pouvons dire que dans les combat aériens au Kosovo, notre armée de l'air a bénéficié de capacités conséquentes de tirs d'armement guidés lasers, notamment celles des Mirage 2002. Et nos avions ont fait preuve d'une très grande dextérité - naturellement, le terme n'est pas plaisant mais il s'agit aussi de cela - dans les missions d'attaque directe contre les forces serbes. Nous étions d'ailleurs les seuls européens capables de participer à toutes les missions aériennes de la coalition : reconnaissance, observation, appui au sol, défense aérienne, frappe contre des infrastructures. On constate ainsi une amélioration très sensible de nos moyens aériens par rapport à la Guerre du Golfe, notamment pour les actions de nuit. Par ailleurs, il faut aussi souligner l'avantage acquis par la France en matière de renseignement sur le théâtre par la conjonction de diverses capacités - satellites, avions de renseignement électroniques, avions de reconnaissance, drones, systèmes héliporté Horizon.

 

Comment, si l'on veut ramener la paix, la stabilité dans les Balkans, assurer en Europe des conditions de vie comparables à celles qui existent dans l'Union au peuple des Balkans ?

 

Je crois qu'il est lucide et raisonnable de répondre qu'il ne sera pas possible que cela se produise d'un coup ou très vite. Ce qui est indispensable, pour les populations du Kosovo, c'est de rétablir le plus rapidement possible des conditions minimales de vie. Il faudra également faire un effort pour que les pays qui ont le plus eu à souffrir des conséquences de la guerre - soit dans leurs liens économiques anciens avec la Serbie, soit par l'accueil des réfugiés comme la Macédoine ou l'Albanie - voient les efforts qu'ils ont accomplis compensés par l'action de l'Union européenne.

 

Enfin il nous faudra aborder la question des destructions en Serbie.

 

Sur le principe, je crois que la réponse est oui : nous n'avons pas fait la guerre au peuple serbe, il a été engagé dans une impasse par ses dirigeants. L'idée que nous pouvons accepter de participer à l'effort de reconstruction d'un certain nombre de potentiels détruits - lorsqu'ils ne sont pas purement et simplement militaires, bien-sûr -, cette question peut être examinée.

 

Le problème de savoir avec qui et le problème de savoir pour qui sont des questions naturellement qui devront trouver leur réponse le moment venu. Ces questions trouveront à l'évidence leur réponse. Je ne suis pas sûr que ce soit exactement le moment où il faut les apporter de façon trop précise.

 

Une série de problèmes a été évoquée : le temps du retrait, l'attitude à l'égard de l'UCK et la place des Russes dans la force.

 

Le temps du retrait doit être aussi rapide que possible et il doit être en même temps maîtrisé. C'est l'objet des discussions militaires techniques qui devaient reprendre peut-être dans la journée, en tout cas rapidement.

 

L'attitude à l'égard de l'UCK est une attitude extrêmement claire de notre part. Nous ne sommes pas favorables à ce que, à la violence des Serbes puisse être substituée la violence d'autres forces. Nous nous battons et nos buts de guerre étaient effectivement le retour des réfugiés dans un Kosovo pluraliste, démocratique et pacifié. Nous ne voulons pas mettre sur le même plan des hommes qui ont combattu au milieu de leur population, face à une violence extrême et à une très grande infériorité de moyens. Mais en même temps, nous ne souhaitons pas qu'au Kosovo règne à nouveau les armes. C'est une question de principe. Nous ne faisons d'ailleurs pas partie des pays qui ont armé l'UCK au cours de la dernière période.

 

C'est notamment pour évider ces risques de tentation de recours à la violence que l'arrivée des premiers éléments de la Kfor doive se faire aussi vite que possible après le retrait des premiers éléments serbes.

 

Donc, de la façon la plus claire : nous ne voulons pas que les problèmes politiques au Kosovo soient réglés autrement que par la voie du dialogue politique tel que nous le concevons.

 

La place des Russes dans la force : elle est encore à discuter, non pas sur son principe, mais elle l'est en ce qui concerne les zones.

 

Les zones envisagées dans la préparation de la mission de la Force d'intervention et de sécurisation seront des zones multinationales, placées sous la direction d'une nation cadre dans chaque zone. Il devrait y avoir cinq zones. A ce stade, les nations cadre désignées sont les suivantes : les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie, la France. La France doit se voir attribuer la zone septentrionale.

 

Quant au volume et à la position sur le terrain des forces russes, elles restent encore, au moment où je vous parle, à déterminer.

 

Concernant le choix de M. Solana, actuel secrétaire général de l'Otan, comme futur monsieur Pesc, je veux vous dire ici, franchement, que le Président de la République et moi-même, nous sommes posé cette question ; mais pas du tout en raison de la personnalité de M. Solana pour lequel nous avons beaucoup d'estime, de respect, dont nous connaissons l'expérience, dont nous connaissons aussi à la fois la francophonie et la francophilie - ce qui n'est pas sans importance lorsqu'on a à choisir un futur responsable pour animer une politique de sécurité commune. C'est vrai, j'ai entendu dire socialiste, mais ça n'a pas paru choquer le Président de la République. Confidence pour confidence, ça ne m'a pas choqué non plus. Et il semble d'ailleurs, que les deux candidats présentés par l'Espagne étaient tous les deux socialistes. Que voulez-vous que j'y fasse ! S'il y a des gens de talent parmi les socialistes, il faut l'accepter.

 

Néanmoins, plus sérieusement, nous nous sommes posé cette question, non en raison de la personnalité de M. Solana mais en raison du symbole que pouvait représenter le choix, pour le premier monsieur Pesc, d'un homme qui était en même temps le secrétaire général de l'Otan, à l'occasion d'un conflit qui, je l'espère, est en train de s'achever sous nos yeux. Disons que nos partenaires de l'Europe ne réagissaient peut-être pas avec la même sensibilité que vous, avec la même sensibilité que nous. Disons également que nous avons beaucoup d'estime pour les qualités personnelles de M. Solana dont nous pensons qu'il sera un très bon monsieur Pesc. Disons aussi qu'au-delà de sa responsabilité d'aujourd'hui dans l'Otan, il aura à coeur de contribuer au développement d'une véritable politique de sécurité commune.

 

Ayant évoqué le problème de l'UCK, j'aborderai les problèmes humanitaires.

 

A l'intérieur du Kosovo, et dès l'arrivée des premiers éléments de la Kfor, nous devrions d'abord acheminer de l'aide alimentaire, par voie terrestre, par largages à basse altitude rendus possibles par l'absence de défense aérienne dans un contexte qui aurait été pacifié.

 

Nous devons ensuite distribuer aux réfugiés qui font le choix de revenir très vite, du matériel d'isolation et de protection permettant de réoccuper au moins les maisons qui ne sont que partiellement détruites. Nous devrons fournir des matériels de reconstruction, des outils, des matériaux. Nous devrons fournir des outils et des semences pour entreprendre à nouveau, dans certaines zones, les cultures.

 

Pour les réfugiés qui seraient appelés à passer l'hiver en Albanie et en Macédoine, nous sommes en train de procéder, avec le HCR, aux repérages de structures en dur disponibles, y compris d'anciennes casernes. Cela est actuellement en cours. D'ores et déjà, les derniers camps font l'objet d'un durcissement des structures et d'un choix de matériaux mieux isolants.

 

Tout cela sera fait en coordination avec l'Europe et naturellement, nous invitons les collectivités locales, les ONG françaises, les entreprises françaises à se mobiliser dans cette direction.

 

Les hypothèses sur le retour des réfugiés : aujourd'hui nous ne faisons que des hypothèses, mais ces questions maintenant vont peut-être devenir des questions aiguës que nous allons traiter, sur lesquelles nous allons concentrer notre énergie.

 

Pour ce gouvernement, ce sera naturellement un défit mais en même temps une mobilisation tout à fait positive qu'avoir à reconstruire alors qu'il s'agissait souvent jusqu'ici, de détruire pour affirmer le refus de l'épuration ethnique.

 

Les hypothèses sur le retour sont actuellement les suivantes : retour plus rapide des paysans mais en ayant à maîtriser le problème des risques des mines antipersonnel ; retour plus lent des citadins qui attendront sans doute que les services publics recommencent à fonctionner ainsi que les systèmes collectifs de chauffage et de distribution d'eau.

 

A propos des relations entre les pays des Balkans et l'Union européenne, le pacte de stabilité pour l'Europe du sud-est, proposé par la présidence allemande - auquel nous avons nous-mêmes contribué -, l'action de la Banque mondiale qui se met en place en raison de propositions françaises, tout cela est naturellement important.

 

Sur la question plus précise de savoir si ces pays seront à côté de l'Union européenne ou au sein de l'Union européenne, je crois que la réponse qu'il faut donner aujourd'hui est qu'ils seront à côté de l'Union européenne et non au sein de l'Union européenne.

 

La démarche qui consiste à aider ces pays, la démarche qui peut consister à les associer par des accords à l'Union européenne, est une démarche absolument indispensable. Mais nous aurions tort de confondre deux plans : le plan de l'aide à ces pays et le plan du processus d'adhésion à l'Union européenne, d'élargissement de l'Union européenne qui doit être traité de façon spécifique.

 

Il serait imprudent, pour des raisons émotionnelles, pour des raisons humanitaires, d'accélérer les processus et de les traiter de façon légère. Les mécanismes de l'élargissement se produiront comme ils sont engagés avec les pays candidats. Ces pays peuvent un jour être candidats à l'Union européenne mais ils s'inscriront alors, dans la démarche de l'élargissement, avec ses mécanismes de sélection, d'appréciation et de transition.

 

A propos de M. Milosevic : quel sera son sort, pourra-t-il être un interlocuteur, pourrons-nous aider la Serbie à se reconstruire en partie tant qu'il sera là, quid de l'application des décisions du tribunal pénal international ? L'annonce de l'inculpation de M. Milosevic et de plusieurs dirigeants serbes, que certains avaient cru pouvoir être un obstacle sur la voie de la paix, ne s'est pas révélée telle. On peut même se demander - ce n'est qu'une hypothèse que je formule devant vous - si M. Milosevic, voyant cette condamnation, cette stigmatisation internationale portée contre lui, ne s'est pas dit au contraire : tant que je suis encore un dirigeant de fait, tant que je possède encore les clés de manettes à Belgrade, faisons que je sois l'interlocuteur pratique, nécessaire, inévitable pour faire la paix. Cela pourra peut-être être positif pour ce qui me concerne. 

 

Donc cela n'a pas joué négativement et je pense que c'est une leçon que nous pouvons tirer, que l'affirmation d'un droit au plan international ne s'est pas révélée incompatible avec le réalisme qui souvent guide les nations et les dirigeants dans leur choix. C'est peut-être de ce point de vue un progrès qui s'est opéré sous nos yeux.

 

Toutes ces questions recevront réponse, et recevront réponse selon les principes qui sont les nôtres : ceux de ce Gouvernement, ceux de la France bien sûr, des autorités publiques françaises, selon nos engagements vis-à-vis du Tribunal Pénal International. Mais nous sommes dans un moment crucial où nous avons d'autres questions à régler. Réglons-les d'abord, nous aborderons celles-ci ensuite. Et nous aurons l'occasion d'en reparler. 

 

Enfin, le Gouvernement sera naturellement attentif aux suggestions, aux propositions qu'ont faites les deux présidents de la commission des Affaires étrangères d'une part, et de la commission de la Défense. En raison de leurs responsabilités, des débats qu'ils conduisent avec vous, du dialogue qu'ils ont noué avec les ministres et parfois avec moi-même, ils disposent dans cette affaire d'une vision et d'une expérience qui nous sera utile. 

 

Je ne sais pas si l'on peut dire que ce fut une erreur de n'avoir pas demandé, pour obtenir une résolution des Nations unies au début du conflit - non pas que j'aie avec le président de la commission de la Défense nationale le moindre désaccord de principe à cet égard naturellement. 

 

Je pense que cela aurait été souhaitable. Je pense que dans la quasi-totalité des cas il faudra se fonder sur cette démarche qui pour nous est essentielle mais je pense aussi, sans doute, que telles que les choses étaient engagées nous n'aurions pas obtenu une telle décision aux Nations unies. En tout cas, nous nous rejoignons dans l'idée que nous avons constamment recherché - la France, la diplomatie française - à réintroduire les Nations unies dans le processus politique et diplomatique, notamment quand nos partenaires américains ont bien dû chercher avec nous une issue politique à un conflit militaire que nous étions en train de gagner.

 

Quant à l'erreur que pourrait avoir consisté le fait d'avoir écarté l'option terrestre, disons que c'est une bonne chose aujourd'hui que cette question restera ouverte.

 

Je voudrais conclure en essayant de me référer aux mots "d'entêtement" et de "volonté" évoqués par J. Lang. Oui, c'est avec cette volonté et cette ténacité que nous devons voter une résolution aux Nations unies, obtenir le commencement puis la réalisation du retrait des forces serbes, arrêter nous-mêmes les frappes, faire entrer la force de sécurisation internationale au Kosovo, préparer le retour des réfugiés, assurer la paix civile et mettre en place une administration provisoire, reconstruire le Kosovo, construire une solution politique acceptable dans cette province, mettre en oeuvre un plan de développement pour les Balkans. Oui, nous venons de participer à une guerre tout à fait particulière puisqu'elle était menée à la fois sur des données qui sont celles d'un conflit international et qu'elle mettait en cause en même temps des valeurs, des principes, des références qui vivent à l'intérieur même de nos nations. Et nous avions conscience que nous étions à la fois sur un terrain international et presque sur un terrain intérieur, du moins si l'on considère que l'Europe fait partie désormais de notre vie politique intérieure. 

 

Dans cette affaire, je pense que, à l'issue de ce conflit, si nous le réglons, selon nos valeurs, selon nos principes, aux conditions de la communauté internationale, l'Europe aura peut-être contribué à marquer qu'elle est fondamentalement un espace de civilisation mais que pour exister dans le monde tel qu'il est, un espace de civilisation a besoin de la capacité, de l'affirmation de la capacité de cet espace à exister et à se faire respecter sur la scène internationale.

 

Je vous remercie".

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