________________________________________
Spécial Serbie
Elections législatives du 11/05/2008
________________________________________
Serbie : Djukic-Dejanovic élue présidente du Parlement | ||
2008-06-26 14:01:03 | XINHUA -
|
|
La Coalition pour une Serbie européenne du Président Boris Tadić a remporté une victoire sans appel aux élections parlementaires de dimanche, avec 38,75% des suffrages, très loin devant le Parti radical serbe (SRS), qui n’obtient que 29,22%, et la coalition DSS-NS de Vojislav Koštunica (11,34%). Le Parti socialiste de Serbie (SPS) se retrouve en position d’arbitre avec 7,57% des suffrages, le Parti libéral démocratique obtenant 5,3%. Les minorités obtiennent 7 sièges au sein du nouveau Parlement.
Les électeurs ont fait mentir les sondages, qui prévoyaient un match très serré entre le Parti radical serbe (SRS, extrême droite nationaliste) et la Coalition pour une Serbie européenne, qui regroupe, autour du Parti démocratique (DS), de petites formations comme le Mouvement serbe du renouveau de l’inusable Vuk Drašković, grande figure de l’opposition serbe depuis le début des années 1990, ou les libéraux du G17 Plus.
Le Parti radical n’a obtenu que 29,2% des voix, une évidente contre-performance alors que son candidat, Tomislav Nikolić, n’avait été battu que d’une courte tête par Boris Tadić au second tour des élections présidentielles, le 3 février dernier. L’autre grand perdant de la journée de dimanche est le Premier ministre démissionnaire, le conservateur Vojislav Koštunica, dont les partisans n’ont recueilli que 11,3% des suffrages.
S’adressant à plusieurs centaines de sympathisants rassemblés dimanche soir dans le centre de Belgrade, Boris Tadić a souligné le sens de cette victoire : les Serbes aspirent à une vie « normale », ce qui suppose la poursuite du processus d’intégration européenne du pays.
Dans les jours qui ont précédé l’élection, l’Europe a pris plusieurs gestes qui ont sûrement pesé sur l’issue du scrutin : le 29 avril, l’Accord d’association et de stabilisation (ASA), première étape vers l’intégration, a finalement été signé avec la Serbie et, il y a une semaine, 17 pays européens ont décidé d’octroyer des visas gratuits à certaines catégories de citoyens serbes. Pour une population privée de liberté de circulation depuis 1992, cette mesure donne une signification concrête à la perspective européenne.
Malgré sa large victoire, le Parti démocratique se retrouve néanmoins devant la tâche difficile de former un nouveau gouvernement, et de trouver des partenaires de coalition.
En théorie, une alliance serait possible avec le Parti libéral démocratique (LDP), qui disposera de 14 députés. Le DS peut aussi compter sur les 7 élus des minorités nationales (2 pour la Liste bosniaque de Sulejman Ugljanin, 4 pour la Coalition hongroise de Voïvodine et 1 pour les Albanais de la Vallée de Preševo), mais cela ne suffira pas.
De toute façon, la formation la plus courtisée sera certainement le Parti socialiste de Serbie (SPS), fort de ses 20 députés. L’ancien parti de feu Slobodan Milošević se retrouve en effet en position d’arbitre. La logique voudrait qu’il penche du côté des nationalistes, mais il a amorcé depuis plusieurs mois des tractations en coulisse pour se rapprocher du Parti démocratique. L’objectif des derniers fidèles de Milošević est simple : devenir un parti de gauche respectable et adhérer à l’Internationale socialiste. Dans cette perspective, le Parti socialiste de Serbie pourrait devenir un partenaire de coalition fort acceptable pour le Parti démocratique. Pour l’instant, le SPS a déclaré qu’il allait prendre langue avec la coalition DSS-NS, mais sans annoncer ses intentions.
Les forces politiques albanaises de la Vallée de Preševo, dans le sud de la Serbie, ont, une nouvelle fois, étalé leurs divisions à l’approche des élections parlementaires et municipales du 11 mai. Alors que la Coalition albanaise présente une liste aux élections parlementaires, d’autres partis ont choisi de boycotter ce scrutin. Au-delà des querelles de personnes, aucune vision de l’avenir de cette petite région, ballotée entre Serbie et Kosovo, ne se dégage.
Par Belgzim Kamberi
Moins de 100.000 Albanais vivent dans les trois municipalités du sud de la Serbie – Preševo, Bujanovac et Medvedja – mais quelque dix groupes politiques albanais différents participent à ces élections, après s’être violemment opposés entre eux durant la campagne électorale. Ces différents groupes politiques albanaise n’ont, une fois de plus, pas réussi à s’entendre pour former une coalition pour les élections parlementaires serbe.
La Coalition des Albanais de la Vallée de Preševo qui avait réussi, non sans difficultés, à faire élire un député lors des dernières élections parlementaires serbes lors des dernières élections législatives serbes, en janvier 2007, a éclaté avant même le début de la campagne, à cause des désaccords financiers entre les deux principaux partenaires de la Coalition - le Parti pour l’action démocratique (PVD) de Riza Halimi et l’Union démocratique de la Vallée (BDL) de Skender Destani.
Malgré tout, la coalition s’est reconstituée avec d’autres groupes politiques locaux. Ce dimanche, bien que la coalition portera le même nom qu’en 2007, elle regroupera donc de nouveaux acteurs. Le PVD de Riza Halimi sera cette fois-ci épaulé par le Mouvement du progrès démocratique (LPD) de Jonuz Musliu, par l’Union démocratique albanaise (UDSH) de Bujanovac et par le Groupe des Citoyens – Rahmi Zylfiu de Preševo.
C’est d’ailleurs seulement au dernier moment que la Coalition des Albanais de la Vallée de Preševo a réussi à présenter les 10.000 signatures nécessaires pour enregistrer une liste pour les élections parlementaires. Cela n’a été possible que grâce à la solidarité des Bosniaques du Sandžak, des Hongrois de Voïvodine et de certaines ONG serbes de Belgrade qui ont récolté des signatures en faveur de la Coalition des Albanais de la Vallée de Preševo (Lire « Des ONG serbes en campagne pour permettre à la liste albanaise de participer aux élections du 11 mai »).
Législatives : la tentation du boycott
Dans ce contexte, et sachant que l’on s’attend à une forte participation électorale, la coalition albanaise risque d’avoir du mal à obtenir de nouveau un siège au Parlement serbe.
Par ailleurs, le Parti démocratique albanais (PDSH) du maire sortant de Preševo, Ragmi Mustafa, et une partie des autres partis politiques albanais sont restés bien déterminés à ne pas participer aux élections législatives. Pourtant, ils ont subi de fortes pressions de la part de certains diplomates occidentaux et de quelques dirigeants politiques de Tirana et de Pristina, qui n’ont pas hésité à s’engager personnellement en faveur de la participation des Albanais du sud de la Serbie aux législatives serbes, présentée comme un moyen de plus pour « contrer » l’éventuelle arrivée au pouvoir des forces nationalistes à Belgrade et de renforcer les forces pro-européennes en Serbie.
De toute façon, la campagne électorale a illustré une nouvelle fois la crise de la scène politique albanaise du sud de la Serbie. Non seulement, le spectre politique est profondément décomposé, mais aucun consensus ne se dégage autour de l’avenir de la région. Toutes les visions politiques sont toujours ballotés entre les approches rationnelles et émotionnelles du nationalisme. Du moins, c’est le constat qui peut être tiré de la rhétorique des différents candidats aux élections.
Les discours électoraux ont plus été marqués par les intérêts personnels et les querelles locales que par la recherche d’une perspective globale pour le pays et la région.
Ceux qui sont favorables à la participation élections aux législatives serbes ont beaucoup de mal à justifier leur choix, car ce sont ces mêmes forces qui avaient organisé le référendum de 1992, jamais reconnu par Belgrade, qui réclamait une « autonomie territoriale et politique » pour la Vallée de Preševo, et « le droit de s’unir au Kosovo ». Les autres courants, considérés aujourd’hui comme « plus nationalistes » démontrent bien, par leurs discours populistes, que leur but est surtout de prendre le contrôle des municipalités les moins développées du pays, plutôt que de mener une véritable politique nationaliste de rupture.
Les appels à la haine et au meurtre se multiplient en Serbie. Le Premier ministre Koštunica et ses alliés dénoncent la « trahison » que le Président de la République Boris Tadić aurait commise en signant l’accord d’association avec l’Union européenne. Sur les murs de Belgrade, des affiches appelent au meurtre de Boris Tadić et du ministre Božidar Đelić. Des menaces à prendre très au sérieux. La sécurité du Président a été renforcée.
Par T. N. Đ, V. Z. C. et T. S.
« Nous avons déjà pris toutes les mesures nécessaires dans le domaine de la sécurité présidentielle. C’est aussi aux citoyens et à la justice de faire leur travail », a déclaré Dragan Šutanovac, ministre de la Défense et vice-président du Parti démocratique (DS), qui refuse de commenter explicitement le niveau de sécurité dont est entouré le chef de l’État.
Chasse aux sorcières
Cependant, le ministre a confirmé que les menaces adressées au Président Boris Tadić étaient extrêmement sérieuses, et il a souligné que certains responsables politiques devraient assumer la responsabilité d’avoir lancé des messages de haine.
« Ces messages ouvrent le concours pour trouver le nouveau sniper qui exécutera le verdict justifié par les discours de la haine. Il est dangereux que quiconque puisse considérer comme légitime de dénoncer les « traîtres » et de les punir en dehors des organes de justice. Ce genre de qualificatifs représentent sans aucune ambiguïté un appel au lynchage. C’est une nouvelle chasse aux sorcières, similaire à celle de l’époque Milošević, quand les opposants politiques pouvaient recevoir une balle dans la tête. Les chefs des partis politiques qui répandent ces discours de haine, comme Vojislav Koštunica ou Vojislav Šešelj, devront assumer leurs responsabilités. Dans les sociétés démocratiques normales, les partis tenant de tels propos seraient sanctionnés par les tribunaux et par les électeurs », a déclaré Dragan Šutanovac.
Dragoljub Mićunović, président du Comité politique du DS, estime que les affiches avec les photos des « traîtres » Boris Tadić et Božidar Đelić, appelant à les liquider, sont une conséquence directe des déclarations du ministre Velimir Ilić, du Premier ministre Koštunica et de son Parti démocratique de Serbie (DSS) sur la « trahison » que représenterait la signature de l’ASA avec l’Union européenne.
La photographie de Puniša Račić qui figure au-dessus de celles de Tadić et de Đelić indique que l’on recherche un exécutant, comparable à ce député du Parti radical qui a tué trois de ses collègues en pleine session parlementaire, en 1928.
« C’est un délit grave. Goebbels n’a probablement tué personne, il n’y était pas obligé parce que les autres le faisaient pour lui. Ce discours irresponsable doit être empêché, cette rhétorique dégrade notre image au niveau international. Ce vocabulaire mérite des condamnations, alors qu’il est devenu habituel de de traiter les gens de traîtres. Dans les pays normaux cela entraîne de graves sanctions judiciaires. Dans notre pays, il suffit de dire : ’Je suis le plus honnête et le plus grand patriote, tous les autres sont des traîtres’. Cela dégrade toute personne normale », déclare Dragoljub Mićunović.
Il souligne que dénoncer les appels à la haine n’a rien à voir avec le délit d’opinion. « Les gens qui prétendent cela n’ont aucune culture juridique, ils n’ont rien compris. Tout d’abord, le délit d’opinion ne doit pas être sanctionné car cela introduirait la censure, mais le délit verbal de ce genre est sujet à des sanctions. C’est pourquoi il est nécessaire de rechercher les auteurs de ces affiches », ajoute-t-il.
Vuk Drašković : « les disciples de Tomislav Nikolić »
Vuk Drašković, le président du Mouvement serbe du renouveau (SPO), allié au DS dans la coalition « Pour une Serbie européenne », rappelle que tous les attentats dont il a été victime ont toujours été précédés de menaces similaires à celles adressées au Président Boris Tadić.
« Ces menaces ne sont pas anodines, parce qu’elles proviennent des structures criminelles du régime de Milošević. Ces terroristes et ces criminels croient que la Serbie votera pour eux et pour leurs partis le 11 mai. Les affiches qui présentent le Président de la République comme un ennemi de l’État, et le terroriste radical Puniša Račić comme un vengeur illustrent de la meilleure manière possible le but réel de ces menaces, et quelles seraient les conséquences d’une victoire de ces courants du passé en Serbie. Tomislav Nikolić les a encouragés en déclarant publiquement qu’il n’acceptait pas la peine prononcée contre les assassins de Zoran Đinđić, et qu’il voulait personnellement revoir la culpabilité de Milorad Ulemek Legija », a ajouté Vuk Drašković.
Bora Banjac, ancien chef de la Direction pour la lutte contre la criminalité organisée, estime aussi que les menaces adressées au Président Boris Tadić doivent être prises au sérieux.
« La Serbie a déjà payé le prix fort pour avoir négligé les menaces adressées au Premier ministre Zoran Đinđić avant son assassinat. Lorsque de telles menaces se font entendre, il ne faut pas hésiter, toutes les institutions doivent travailler sérieusement pour découvrir leurs auteurs. Ce sont des moments où l’État doit démontrer sa force et où tout doit être pris au sérieux », précise Bora Banjac.
Des menaces très sérieuses
Rajko Danilović, avocat de la famille Đinđić, considère aussi que les menaces sont sérieuse. « Toute menace est sérieuse ! Bien évidemment ! Zoran Đinđić n’a-t-il pas été assassiné ? Ce n’est pas une blague ! L’expérience et la connaissance des mentalités démontrent qu’il serait naïf de se mentir. Le besoin de retrouver les auteurs de ces menaces est urgent et incontestable », affirme Rajko Danilović.
Sonja Liht, présidente du Fonds pour la société ouverte [Lire notre article « Sonja Liht, une grande dame de la société civile serbe »], avertit que ces menaces sont sérieuses, surtout dans un pays comme le nôtre, où certaines menaces ont déjà été réalisées. Elle indique que les messages politiques émis par le Premier ministre, son parti politique et ses partenaires de coalition dépassent le simple discours de la haine.
« Prononcer des accusations sérieuses comme celle d’avoir signé un document falsifié, ou d’avoir trahi la Constitution... Dans un État qui prétend être basé sur le règne du droit, de telles accusations ne devraient pas être prononcées sans être véridiques. C’est un jeu dangereux, similaire aux discours des années 1990 dont nous connaissons tous le résultat. Le discours de la haine et ces lourdes accusations représentent deux registres différents. Si vous dites que le Président a violé la Constitution, il faut en fournir des preuves. »
Slobodan Pajić, ancien chef de la sécurité de Nebojša Čović et propriétaire d’une agence d’investigation privée estime que les services de renseignements (BIA) devraient veiller à la sécurité du Président de la Serbie ainsi qu’à celle de tous les autres hauts fonctionnaires de l’État.
« La sécurité personnelle du Président est assurée par l’armée, mais la première tâche de la BIA est de protéger les hauts fonctionnaire. Je crois que les auteurs des lettres de menace se trouvent parmi les membres des services secrets militaires et civils qui ont ont longtemps dominé les centres du pouvoir », estime Slobodan Pajić.
Milan Ivanović, président du Conseil national serbe du nord du Kosovo et Marko Jakšić, président de la Communauté des municipalités serbes du Kosovo, ont annoncé que leurs organisations allaient porter plainte contre Boris Tadić pour « la trahison commise avec la signature de l’ASA avec l’Union européenne ». Ils ont annoncé que des plaintes contre Božidar Đelić et Vuk Jeremić seraient également déposées auprès du Tribunal régional de Belgrade.
La dramaturge Biljana Srbljanović est candidate à la mairie de Belgrade. Cette intellectuelle engagée dans tous les combats anti-nationalistes depuis 20 ans a choisi de sauter le pas en portant les couleurs du Parti libéral démocratique (LDP). Elle est aussi numéro 2 sur la liste parlementaire, aux côtés de Čedomir Jovanović. Biljana Srbljanović, qui est également présidente d’honneur du Courrier des Balkans, nous explique les raisons de son engagement, et tire le bilan de la campagne électorale.
Propos recueillis par Jean-Arnault Dérens, Philippe Bertinchamps et Marija Janković
Le Courrier de la Serbie (CdS) : Pourquoi as-tu choisi de t’engager directement en politique, et d’être candidate pour le LDP ?
Biljana Srbljanović (BS) : Je partage les idées de Čedomir Jovanović depuis vingt ans. Quand Slobodan Milošević est arrivé au pouvoir, j’avais 18 ans et c’était la première fois que je votais. Je viens d’une famille anti-nationaliste et profondément pacifiste. Tout au long des années 1990, je me suis présentée comme une intellectuelle indépendante, luttant contre Milošević et contre la guerre. J’étais active, mais sans avoir d’engagement politique direct. Pendant la guerre de Bosnie-Herzégovine, j’ai manifesté des dizaines de fois, mais je n’ai pas sauvé une seule vie à Sarajevo. Ce n’est que lorsque Zoran Đinđić a été assassiné que je me suis engagée en politique. Pour moi, ce meurtre a marqué la fin d’une espérance, le début d’une époque noire, le moment le plus bas de la vie sociale et politique du pays. J’ai choisi de m’engager, de militer, mais comme une simple citoyenne. Les collaborateurs et les amis de Zoran Đinđić ont formé le LDP. J’ai voté pour ce parti, j’ai choisi d’y adhérer et je suis devenue membre du conseil politique. Mais je suis la seule candidate qui ne soit pas une politicienne professionnelle.
CdS : Quel est ton programme pour la mairie de Belgrade ?
BS : Mon programme repose avant tout sur la rupture avec le contrôle des partis politiques sur les municipalités. Ce contrôle rappelle l’époque communiste. Moi, si je suis élue maire de Belgrade, j’appliquerai un système de concours ouverts. Les candidats à tous les postes devront envoyer leur CV, sans mentionner leur parti, leur appartenance nationale ou confessionnelle. Et si un candidat est bon, on le prendra, même si il est membre du Parti radical. La loi électorale a changé : pour la première fois, on ne vote pas pour un candidat mais pour la liste d’un parti. Et ce sera au parti gagnant de décider qui aura le pouvoir en ville. Je suis aussi favorable à une décentralisation fiscale, donnant plus de compétences aux municipalités. Mais à l’intérieur même de la mairie de Belgrade, il faut décentraliser le pouvoir. Si je suis élue maire, je ne gouvernerai pas seule. Je constituerai un conseil des mairies d’arrondissement. Il faut également que la mairie de Belgrade reprenne le contrôle de la police. À Belgrade, après les émeutes du 17 février, la police n’a arrêté que trois personnes. Jusqu’ici, le chef de la police était nommé par le gouvernement, c’est-à-dire par le DSS, le parti de Koštunića, qui ne faisait rien. Ainsi, depuis 2003, sur 84 meurtres commis à Belgrade, 70 n’ont pas été résolus. Cela s’explique par l’influence des criminels sur le gouvernement. Personne ne veut assumer ses responsabilités. On dit que c’est la faute au système. Il faut donc changer le système !
CdS : Tu es numéro 2 sur la liste du LDP aux élections législatives. Partages-tu toutes les idées du programme du LDP ou as-tu des points de désaccord ?
BS : Je suis d’accord à 100% avec le programme du LDP. Depuis que je suis entrée en politique, mes idées ont évolué. Par exemple, j’étais contre l’entrée de la Serbie dans l’OTAN, parce que je suis pacifiste. Or, si la Serbie entre dans l’OTAN, l’influence de la police secrète sur la politique intérieure diminuera. Mes idées ont donc évolué, et j’accepte l’adhésion à cette organisation militaire parce que je veux que la situation des citoyens de mon pays s’améliore.
CdS : En cas de victoire, avec qui le LDP s’alliera-t-il pour former une coalition ?
BS : Nous pouvons former une coalition avec le DS et les minorités. Avec le SPS, le DSS et le SRS ? Jamais ! Ils ont soutenu la guerre, et nous, nous ne voulons pas la guerre !
CdS : En France, où tu vis une partie de l’année, tu as soutenu José Bové lors de la dernière campagne présidentielle. Y a-t-il des points communs entre José Bové et Čedomir Jovanović ?
BS : Oui. Tous deux représentent une minorité sans compromis, et tous deux sont fiers d’être minoritaires. Ils ne vont pas à la pêche aux voix au détriment de leurs idées. Avec eux, on prend ou on ne prend pas ! Je continue à rester proche des idées de José Bové, comme l’opposition aux OGM.
CdS : As-tu un message pour les Serbes de la Diaspora ?
BS : Il faut que les Serbes de la diaspora votent ! En tout, 40 000 Serbes de la diaspora sont enregistrés sur les listes électorales. Ils ont l’obligation morale de voter (même s’ils ne peuvent pas voter aux élections municipales). Il faut qu’ils pensent à leurs enfants et à leur pays qui besoin d’aide. Comme moi aussi, je fais partie de la diaspora, je comprends leur nostalgie et le sentiment d’injustice qui peut les pousser à ne pas voter. Mais cette fois, il faut voter ! Pour un programme, et non pas pour une idéologie.
CdS : Pour toi, comment se passe cette campagne ?
BS : Cette campagne est une campagne sale ! En s’en prend à moi en tant que femme. On m’insulte, on lance des rumeurs avilissantes, on publie de fausses photos de moi. Pourtant, en Serbie, le vrai pouvoir appartient aux femmes. Ce sont elles qui travaillent, qui gardent les enfants et qui assument ensuite les bêtises des hommes. En Serbie, on croit vivre dans une société macho. Or, ce pays est faussement macho ! Il s’agit en fait d’une véritable société matriarcale. Ce sont les femmes qui représentent le vrai pilier de la société. Les hommes, eux, ils ne font rien. Ils font juste semblant de faire quelque chose. Tout au long de cette campagne, j’ai rencontré beaucoup de femmes éloignées du LDP qui ont envie de me soutenir.
Retrouvez la fiche des pièces de Biljana Srbljanović traduites en français :
Histoires de famille, suivi de La trilogie de Belgrade
Supermarché, suivi de La Chute
http://balkans.courriers.info/article10428.html
Dimanche, la Serbie vote à nouveau, pour des élections législatives cruciales, après une courte campagne dominée par les deux thèmes de l’intégration européenne et du Kosovo. Les sondages annoncent une forte participation, sans qu’une majorité claire ne puisse se dégager. Tour d’horizon des principaux partis, de leurs chances de succès et de leurs possibilités d’alliances. Le même jour, les électeurs doivent aussi renouveler les conseils municipaux ainsi que le Parlement provincial de Voïvodine.
Par Loïc Tregoures
La campagne a pris l’allure d’un référendum pour ou contre
l’intégration européenne, surtout depuis la signature le 29 avril de
l’Accord de Stabilisation et d’Association entre l’UE et la Serbie.
Ainsi, deux blocs tendent à se dégager. D’abord le bloc pro-européen
emmené par le Parti démocratique (DS) de Boris Tadić qui réunit
sur sa liste le G17+ et le Mouvement serbe du renouveau (SPO) de Vuk Drašković.
A coté de la coalition du DS, on retrouve le Pari libéral démocratique
(LDP) de Čedomir Jovanović.
Démocrates divisés mais confiants
Tous font campagne pour l’intégration européenne de la Serbie. Il
existe toutefois une différence de taille entre le DS et le LDP qui est
leur position sur le Kosovo, puisque Borius Tadić a clairement affirmé
qu’il ne reconnaîtrait jamais l’indépendance du Kosovo, tandis que
le LDP n’est pas opposé à cette indépendance. Le président Tadić
a d’ailleurs affirmé à la télévision que le LDP devrait revoir sa
position sur le Kosovo avant d’envisager tout éventuel accord de
gouvernement.
« Il y a ceux qui entretiennent la peur. Nous ferons preuve de
courage pour atteindre nos objectifs. Personne ne pourra nous empêcher de
rejoindre l’Union européenne », a martelé Boris Tadić lors
de son meeting à Belgrade, avant d’ajouter que « plus jamais
Vojislav Koštunica ne dirigera(it) le pays ».
De son côté, Čeda Jovanović a appelé les Serbes à se
tourner vers l’avenir et à « offrir une chance aux jeunes de
Serbie d’avoir un avenir meilleur au sein de l’Union européenne ».
Les Radicaux aux portes du pouvoir ?
De l’autre côté, on retrouve les partis qui dénoncent l’ASA
comme une reconnaissance implicite du Kosovo, et font campagne sur la défense
du Kosovo, à savoir la coalition Parti démocratique de Serbie et
Nouvelle Serbie (DSS-NS) de Vojislav Koštunica.et Velija Ilić et,
dans une moindre mesure, le Parti radical serbe (SRS) de Tomislav Nikolić.
Ce dernier insiste en effet davantage sur des thèmes sociaux et sociétaux
tels que la lutte contre la pauvreté, la corruption ou encore la
criminalité.
« Le Kosovo est le coeur de la Serbie et être serbe signifie dire que le Kosovo appartient à la Serbie et à la nation serbe. Cela a toujours été comme ça et doit rester ainsi ».
« Aucun pays au monde n’a été traité comme la Serbie l’a
été, en lui demandant d’abandonner une partie de son territoire
soit-disant pour son propre bien », a répété Vojislav Koštunica
durant son dernier meeting de campagne.
Succédant à la tribune au président de la commission des Affaires étrangères
de la Douma, le Parlement russe, Konstantin Kosachov, qui a réaffirmé le
soutien de la Russie et du Président Poutine à la Serbie et à Koštunica,
ce dernier a assuré qu’en cas de victoire, il ferait immédiatement
annuler l’ASA par la nouvelle assemblée, car « cet accord représente
une trahison envers le Kosovo et la Serbie ».
Il faut rappeler que cet ASA a été entériné vendredi 9 mai par le
gouvernement, en même temps que l’accord gazier avec la Russie, mais en
l’absence des ministres du DSS et de NS, qui ont quitté la salle avant
le vote.
Partenaire de coalition du DSS, Velija Ilić a été plus direct en
affirmant sans détour que Boris Tadić était « un traitre à
la nation serbe », et il a appelé de ses voeux une coalition formée
par le Parti radical, le DSS et NS.
Pour leur part, les Radicaux sont plus confiants que jamais dans leur
capacité à former un gouvernement, en coalition avec le DSS, et peut-être
même le soutien de certains députés des minorités nationales. « En
étant réaliste, c’est soit ça, soit rien du tout », a estimé
Tomislav Nikolić jeudi dernier.
Le vice-président du SRS a également déclaré que le Serbie devait
se tourner vers les pays qui n’avaient pas reconnu l’indépendance du
Kosovo (plus de 150 à ce jour) comme la Russie, la Chine, l’Inde ou
encore le Brésil.
Sur le Kosovo, il a également ajouté que « l’ONU ne devait
pas se retirer, car dans ce cas l’armée de la Serbie et la police serbe
devraient retourner au Kosovo ».
Enfin, alors que le procès de Vojislav Šešelj entre dans sa phase
terminale, certains analystes prévoient son retour en Serbie avant même
la fin de l’année, ce dont Tomislav Nikolić se réjouit en
soulignant que la place de Šešelj était « dans le gouvernement au
service de la Serbie ».
Le SPS de Milošević en faiseur de rois ?
Dans ce paysage politique, il semble néanmoins que le faiseur de roi
pourrait être le Parti socialiste de Serbie (SPS) de feu Slobodan Milošević.
En effet, bien que son leader Ivica Dačić ait affirmé vouloir
discuter en priorité avec le DSS en vue de la formation d’une coalition
SRS-DSS-NS-SPS, tout en excluant en outre de soutenir un gouvernement
minoritaire, les rumeurs prétendent qu’il ne serait pas impossible que
le SPS parvienne à un accord avec le DS, auquel le LDP ne s’opposerait
pas.
Les sondages s’accordent tous pour donner en tête le SRS suivi du
DS, dans un mouchoir de poche autour de 30 à 35%. Viendrait ensuite la
coalition DSS-NS aux alentours de 12-13%, puis le LDP et le SPS crédités
chacun de 5 à 7%.
Ainsi, alors que la répartition des sièges ne devrait pas réserver
de grandes surprises, tout reste néanmoins possible quant aux tractations
entre les partis politiques en vue de former un gouvernement.
Cependant, il se peut tout à fait qu’aucun accord ne soit conclu au terme de la période prévue par la Constitution, et que le pays reparte pour de nouvelles élections vers la mi-septembre. Cela ne ferait que prolonger la crise dans laquelle la Serbie est plongée depuis la déclaration d’indépendance du Kosovo le 17 février dernier.